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  le blog labrousse.erick par : ERICK

Droit et Devoir de Mémoire deuxième guerre mondiale 1940 1945 LUTTER CONTRE LA RÉHABILITATION DE VICHY OU DE SON ADMINISTRATION DE L ÉTAT FRANÇAIS

le Vatican et le nazisme

le Vatican et le nazisme

Réseaux d’exfiltration nazis

Les réseaux d’exfiltration nazis désignent les filières d’exfiltration utilisées par les nazis et les fascistes fuyant l’Europe à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ces filières conduisaient essentiellement vers des abris sûrs situés en Amérique latine, en particulier en Argentine, au Paraguay, au Brésil, au Chili et également au Moyen-Orient, principalement en Égypte. D’autres destinations peuvent avoir inclus les États-Unis et le Canada.Nazis et Amérique du Sud : une vieille complicité


Dans les derniers mois de la Seconde Guerre mondiale, beaucoup de criminels nazis sentent qu’il est temps de fuir pour échapper aux poursuites de la justice. Si certains tentent seuls d’organiser leur évasion, bon nombre d’entre eux vont bénéficier de véritables filières qui leur permettront de se cacher pendant des décennies à l’ombre des dictatures sud-américaines où, en échange de leur tranquillité, ils rendront de «menus services».

Dirigeants du IIIe Reich et chef de l'Église catholique durant la Deuxième Guerre mondiale. Des milliers de nazis, criminels de guerre pour beaucoup, ont trouvé refuge en Amérique latine, avec le soutien de réseau d'évasion catholique et les services secrets des États-Unis.

D’emblée, comme le font remarquer M. Aarons et J. Lofus : «Il est absurde de croire que 30 000 fugitifs nazis aient pu gagner l’Amérique du Sud à bord de quelques U Boot encore en état de marche à la fin de la guerre ou qu’ils aient pu se lancer seuls dans cette hasardeuse traversée et l’organiser sans aucune aide extérieure » (1).

Après la défaite de 1945, les filières d'exfiltration des chefs et autres combattants du IIIe Reich hitlérien furent donc nombreuses. Parmi les plus connues, on peut citer celle mise en place par Odessa, l'organisation secrète des SS fondée au lendemain de la guerre, ou encore «Die Spinne» et «Ratlines».

Mais dans ce que l’on peut appeler la «première vague», les réseaux gravitant autour du Vatican ont joué un rôle central. A la fois par opportunisme ou par anticommunisme viscéral, des personnalités ecclésiastiques telles que monseigneur Aloïs Hudal ou encore le père Krunoslav Draganovic prêteront main forte aux nazis désirant fuir la justice internationale. Ils aideront notamment Franz Stangl et Ante Pavelic. Commandant du camp d’extermination de Treblinka, Stangl trouva refuge au Brésil de 1951 à 1967. Pavelic, le dirigeant de l'État indépendant de Croatie pro-nazi durant la Guerre 40-45, s'exila en Argentine en 1945 et y restera jusqu'en 1957.

Autre acteur important des filières d'évasion, les services de renseignements américains (CIC, OSS – l'ancêtre de la CIA actuelle -...). Dans le cadre de la «guerre froide» contre les soviétiques et de la lutte internationale contre le communisme, les États-Unis vont recruter des officiers de la SS et d'autres piliers du régime allemand qui vient d'être vaincu. D’anciens nazis allemands seront utilisés, dès la fin des années 1940, pour apporter leur savoir-faire, sur le continent sud-américain, à des dictatures anticommunistes soutenues par Washington. Le cas le plus illustratif est celui de Klaus Barbie, le chef du Sicherheitsdienst à Lyon, le service de renseignements de la SS, connu également sous le surnom du «boucher de Lyon».La fuite des nazis en Amérique latine, avec l'aval des États-Unis, a régulièrement fait la Une de l'actualité. Comme le montrent ces couvertures de France-Soir de 1972, celle du Nouvel Observateur et son article sur les rapports entre l'ex-SS Klaus Barbie, surnommé le «boucher de Lyon», et la CIA –


Tout le monde gagne…
Mais pourquoi l’Amérique du Sud ? Deux éléments d’explication peuvent être avancés : d’une part, l’éloignement de l’Europe de ce continent très vaste qui permettait également de se cacher sans trop de difficultés, malgré les recherches internationales. D’autre part, les régimes autoritaires de droite mis sur pied en Amérique du Sud pour contrer le communisme ont souvent accueilli avec bienveillance des personnages qui ont pu rendre des «services» à ces régimes pendant de nombreuses années. L’’exemple le plus frappant de cette collusion étant sans conteste la fameuse «colonie Dignidad» qui servit de sinistre lieu d’interrogatoire sous la dictature chilienne de Pinochet (voir ci-dessous notre encadré).

L’Argentine du dictateur Peron ne fut pas en reste puisqu’elle accueillit, après la guerre, le SS-Obersturmbannführer Adolf Eichmann. Cet artisan de la «solution finale» sera aidé en 1950 par le réseau Odessa qui lui permettra, après un périple en Autriche, puis en Italie, de gagner l’Argentine, avant d’être repéré, puis enlevé en 1960 par les Israéliens. Il sera jugé en mai 1960 en Israël et pendu le 31 mai 1962 (2).

Autre exemple tristement célèbre : Josef Mengele. Ce médecin sadique pratiquera les expériences les plus horribles sur des prisonniers du camp d'extermination d’Auschwitz. Après le conflit, il s’enfuira lui aussi en Argentine. Les dirigeants argentins de l’époque refuseront d’ailleurs plusieurs demandes d’extradition en provenance d’Allemagne de l’Ouest. Il fuira ensuite au Paraguay puis au Brésil. L’exhumation de son cadavre dans ce pays, en 1985, confirme que ce sordide individu serait mort en 1979.

On se doit aussi de rappeler le rôle important d’un homme comme Alfred Stroessner (3). D’origine allemande, il grandira dans la société paraguayenne ouvertement pro-fasciste des années 1930-1940, notamment sous la dictature du général Morinigo. Suite à un coup d'État en 1954, Stroessner instaure sa propre dictature et ce, jusqu’en 1989. Le Paraguay de Stroessner constituera donc un excellent refuge pour les nazis en fuite. Des anciens de la Gestapo (la police politique de l'Allemagne nazie) aideront d’ailleurs la police locale dans ses basses besognes.

Parmi les «bouchers» nazis ayant bénéficié de cette protection, citons un cas très connu : Eduard Roshman. Responsable de l’assassinat de 40 000 Juifs en Lettonie, il s'exila d'abord en Argentine, et trouvera finalement un refuge plus sûr à Asuncion, la capitale paraguayenne. Roshman n'y sera jamais inquiétéCes filières ont été rendues célèbres par le thriller publié par l’écrivain Frederick Forsyth sous le nom de The Odessa File (Le Dossier Odessa). La réalité était à la fois plus prosaïque et peut-être plus choquante : des gouvernements et des institutions internationales ont joué un rôle plus important que les organisations secrètes.

L’évêque catholique Alois Hudal était le recteur du Pontifico Instituto Teutonico Santa Maria dell’Anima à Rome, un séminaire pour prêtres autrichiens et allemands, et le Directeur Spirituel des Allemands résidant en Italie Après la fin de la guerre en Italie, Hudal devint actif dans le ministère des prisonniers de guerre et des internés germanophones détenus dans des camps en Italie. En décembre 1944, le Secrétariat d'État du Vatican reçut la permission de désigner un représentant pour « visiter les internés civils germanophones en Italie », une tâche qui fut assignée à Hudal.

Hudal se servit de cette position pour aider des criminels de guerre nazis à s’échapper. Parmi ces derniers figuraient Franz Stangl, commandant de Treblinka, Gustav Wagner, commandant de Sobibor, Alois Brunner, responsable du camp d’internement de Drancy près de Paris et chargé des déportations en Slovaquie à destination des camps de concentration allemands, et Adolf Eichmann– un fait sur lequel il s’ouvrirait plus tard sans manifester de remords. Certains de ces hommes recherchés étaient détenus dans des camps d’internement. Dépourvus de papiers d’identité, ils étaient le plus souvent enrôlés dans les registres du camp sous de faux noms. D’autres nazis se cachaient en Italie et s’adressèrent à Hudal lorsque son rôle dans l’aide aux fuyards devint connu dans les communautés nazies3. Dans ses mémoires, Hudal écrivit au sujet de ses actions : Je remercie Dieu qu’Il m’ait permis de visiter et de réconforter beaucoup de victimes dans leurs prisons et camps de concentration et de les avoir aidé à s’enfuir avec de faux papiers d’identité

Il expliquait qu’à ses yeux,

Selon ce qu’écrivent Mark Aarons et John Loftus dans leur ouvrage Unholy Trinity, Hudal fut le premier ecclésiastique catholique à se consacrer à la mise en place de filières d’exfiltration. Aaron et Loftus prétendent que Hudal fournissait aux bénéficiaires de sa charité de l’argent pour les aider à s’échapper et, chose plus importante, des faux documents incluant des papiers d’identité délivrés par l’organisation du Vatican pour les réfugiés (Commissione Pontificia d’Assistenza).

Ces documents du Vatican n’étaient pas réellement des passeports et, par eux-mêmes n’étaient pas suffisants pour permettre un voyage outre-Atlantique. Ils constituaient toutefois la première étape dans une chasse aux documents. Ils pouvaient par exemple être utilisés pour obtenir un passeport de personne déplacée de la Croix-Rouge internationale (CRI), passeport qui pouvait ensuite être utilisé pour obtenir des visas. Le CRI aurait dû effectuer des contrôles de vraisemblance sur les passeports des demandeurs. Selon les informations recueillies par Gitta Sereny auprès d’un haut responsable de la branche romaine du CRI6, Hudal pouvait également utiliser sa position d’évêque pour demander au CRI des papiers « établis selon ses spécifications ». Les sources de Sereny font également état d’un trafic illicite actif de documents du CRI volés ou falsifiés à Rome à cette époque.

Selon des rapports déclassifiés des services de renseignement américains, Hudal ne fut pas le seul ecclésiastique apportant de l’aide aux nazis à cette époque. Dans le rapport La Vista déclassifié en 1984, l’agent du Counter Intelligence Corps (CIC) Vincent La Vista expliqua comment il avait facilement pu s’arranger pour que deux faux réfugiés hongrois puissent obtenir de faux documents du CRI au moyen d’une lettre rédigée par un Père Joseph Gallov. Gallov, qui gérait un organisme charitable, soutenu par le Vatican, au profit des réfugiés hongrois, ne posa aucune question et écrivit une lettre à son « contact personnel à la Croix Rouge Internationale qui délivra alors les passeports »

Cependant, les relations entre Monseigneur Hudal et le Vatican ne sont pas bonnes. En effet, quand Hudal publia en 1937 son livre sur les fondements du national-socialisme les autorités de l'Église se fâchèrent à cause de son éloignement radical des enseignements de l'Église. Hudal remettait ouvertement en question la politique du Pape Pie XI et d'Eugène Pacelli (le futur Pape Pie XII) envers le national-socialisme, qui culmine dans l'encyclique Mit brennender Sorge dans laquelle le Vatican attaque ouvertement le national-socialisme. Par conséquent, l'ascension rapide d'Hudal au Vatican est gelée et finira par son abdication et son renvoi hors de Rome après la guerre. Le Pape Pie XI et Eugenio Pacelli avaient bien essayé de changer Monseigneur Hudal, mais après l'échec de plusieurs rencontres ils mirent fin à tout contact avec lui. Dans ses mémoires posthumes, Hudal se rappelle d'ailleurs avec amertume le manque de soutien de la part du Saint Siège dans la lutte contre le Bolchevisme athée à l'Est. Il atteste plusieurs fois avoir reçu de vertes critiques contre le système nazi de la part des diplomates du Vatican sous Pie XII, au lieu du soutien espéré.

La filière San Girolamo

Selon Aaron et Loftus, les opérations menées à titre privé par Hudal portaient sur une petite échelle par rapport à ce qui allait se produire par la suite. La principale filière d’exfiltration romaine était gérée par un petit, mais influent, réseau de prêtres croates, membres de l’ordre des Franciscains, sous la direction du Père Krunoslav Draganović. Ce dernier avait organisé une filière hautement sophistiquée, dont le quartier général se trouvait au séminaire San Girolamo degli Illirici à Rome, mais qui disposait de liens à partir de l’Autriche jusqu’au point final d’embarquement à Gênes. Au départ, la filière se concentra sur l’aide aux membres du mouvement fasciste croate Oustachi, le plus notable étant Ante Pavelic qui avait été dictateur durant la guerre

Aarons et Loftus précisent que les prêtres actifs dans la chaîne comprenaient le frère Vilim Cecelja, ancien Vicaire militaire détaché aux Oustachis, basé en Autriche où beaucoup de réfugiés nazis et Oustachis restaient cachés, le frère Dragutin Kamber, basé à San Girolamo; le frère Dominic Mandic, dont on dit qu’il était un représentant officiel du Vatican à San Girolamo et aussi « Économiste Général » ou trésorier de l’ordre des Franciscains – Aarons et Loftus prétendent qu’il fit valoir cette position pour mettre la presse franciscaine à la disposition de la filière et Monseigneur Karlo Petranovic, basé à Gênes.

Cecelja prenait contact avec ceux qui se cachaient en Autriche et les aidait à franchir la frontière italienne; Kamber, Mandic et Draganovic leur trouvaient du logement, souvent dans le monastère lui-même, pendant qu’ils se chargeaient de réunir les papiers nécessaires; finalement, Draganovic téléphonait à Petranovic à Gênes pour lui communiquer le nombre de couchettes nécessaires sur des bateaux en partance pour l’Amérique du Sud (voir ci-dessous pour l’opération à son extrémité sud-américaine).

Les opérations de la filière Draganovic étaient un secret de polichinelle au sein de la communauté du renseignement et des cercles diplomatiques à Rome. Dès août 1945, les commandants alliés à Rome posaient des questions relatives à l’utilisation de San Girolamo comme abri pour les Oustachis11. Un an après, un rapport du département d’État des États-Unis daté du 12 juillet 1946 donnait une liste de neuf criminels de guerre, incluant des Albanais et des Monténégrins ainsi que des Croates plus d’autres « qui ne sont pas réellement abrités dans le Collegium Illiricum (càd. San Girolamo degli Illirici), mais qui par ailleurs jouissent du support et de la protection de l’Église » En février 1947, l’agent spécial du CIC Robert Clayton Mudd rapportait que dix membres du cabinet Oustachi de Pavelic vivaient soit à San Girolamo ou au Vatican lui-même. Mudd avait infiltré un agent au sein du monastère et confirmait qu’il était « truffé de cellules de collaborateurs Oustachis » gardés par des « jeunes en armes ». Mudd rapportait également :

Mudd concluait comme suit :

L’existence de la filière de Draganovic est admise par l’historien du Vatican Frère Robert Graham, qui déclara à Aarons et Loftus : « Je n’ai pas de doute que Draganovic était extrêmement actif dans l’exfiltration de ses amis oustachis croates ». Graham insista toutefois sur le fait qu’il ne fut pas officiellement sanctionné par ses supérieurs : « Le fait qu’il soit prêtre ne signifie pas qu’il représente le Vatican. Il s’agissait de sa propre opération »

En Égypte et en Syrie

Après la guerre, des milliers17 de nationaux-socialistes rejoignirent l'Irak, la Syrie et surtout l'Égypte entre 1948 et 1951 où ils ont mené des activités relatives à la politique et à la sécurité

En 1967, l’historien Kurt Tauber a décrit la situation qui était celle de l’Égypte de Nasser : «… En plus des dons de la Gestapo et de la SS, il y avait aussi un grand besoin d’autres aptitudes sur le Nil. On nous dit que d’anciennes recrues de Goebbels, initialement sous la supervision du défunt Johann von Leers, jouent un rôle important dans l’appareil de propagande antijuif et antisioniste de Nasser. À ce propos, nous entendons les noms de Werner Witschale, du Baron von Harder, de Hans Appler et de Franz Buensche. Mais un passé d’agent de la Gestapo, de la SS et des services d’espionnage n’empêche pas d’accéder à des carrières attractives au ministère égyptien de la propagande. Walter Bollmann, chef nazi des services d’espionnage en Grande-Bretagne avant la guerre, et plus tard, commandant SS, a servi dans la lutte contre la guérilla et les opérations antijuives en Ukraine ; Louis Heiden, officier SS qui fut transféré au bureau de presse égyptien durant la guerre, Franz Bartel, "vieux combattant" et officier dans la Gestapo ; Werner Birgel, officier SS de Leipzig ; Albert Thielemann, dirigeant SS en Bohème ; Erich Bunz, Major dans la SA et expert dans la question juive ; et le capitaine SS Wilhelm Boeckler, qui participa à la liquidation du Ghetto de Varsovie – sont tous réputés s’être occupés de propagande antijuive pour le compte de Nasser… »

Le cas de Johann von Leers est exemplaire à ce sujet. Membre dirigeant de la NSDAP à la fin de 1929, colonel SS, rédacteur de Der Angriff, auteur de différentes études d'anthropologie, le professeur d'université von Leers fut l'intime collaborateur de Joseph Goebbels, lequel lui confia la direction du Nordische Welt, organe de la Société pour la préhistoire et la protohistoire germanique. Après dix-huit mois d'internement dans un Lager anglo-américain, Von Leers réussit à fuir en Argentine, où il dirigea un journal en langue allemande. À la chute de Péron, il se mit à l'abri en Égypte ; ici il se convertit à l'islam et prit le nom de Omar Amin. Von Leers organisa au Caire l'Institut de recherche sur le sionisme, dirigea des émissions radiophoniques écoutées dans tout le monde arabe, se chargea d'une importante collection de textes islamiques destinés au public allemand et donna vie à diverses initiatives éditoriales et de propagande. En Égypte, von Leers devint un ami proche de l’ancien Mufti de Jérusalem, Muhamad Hadj Amîn al-Husaynî22.

Parmi ceux qui devinrent musulmans et qui exercèrent des fonctions d'un certain niveau dans l'État égyptien, citons : Joachim Daeumling, ex-chef de la Gestapo de Düsseldorf, qui réorganisa les forces de police en Égypte sous la responsabilité d'Otto Skorzeny; William Boeckler (Abd el-Karîm), ex-capitaine de la Gestapo, qui assuma une charge au service d'information; l'ex-SS Wilhem Berner qui entraîna les fedayin palestiniens ; l'ex-SS-Gruppenführer A Moser (Hasan Suleymâm), qui occupa un poste d’instructeur militaire; l'ex-commandant de la garde du corps de Hitler Léopold Gleim (an-Nâsir), qui alla former les cadres des services de sécurité ; Louis Heiden (al-Hâj), ex-membre de l'Office central de sécurité du Reich, qui traduisit Mein Kampf en arabe

La filière argentine

Juan Peron, président de l’Argentine, déclare à propos des tribunaux de Nuremberg ayant jugé les criminels de guerre nazis: « À l’époque il se produisait à Nuremberg quelque chose que personnellement je considérais comme une honte et une malheureuse leçon pour le futur de l’humanité. J’acquis la certitude que le peuple argentin aussi considérait le procès de Nuremberg comme une honte, indigne des vainqueurs, qui se conduisaient comme s’ils n’avaient pas vaincu. Maintenant nous réalisons [que les Alliés] méritaient de perdre la guerre ».

Sur l’autre rive de l’Atlantique, les personnes exfiltrées au moyen des réseaux reçurent le plus chaleureux accueil dans l’Argentine de Juan Peron. Dans son livre de 2002, Le véritable Odessa24, le chercheur argentin Uki Goñi a utilisé de nouveaux accès aux archives du pays pour démontrer que les diplomates et officiers de renseignement argentins avaient, suivant les instructions de Peron, vivement encouragé les criminels de guerre nazis et fascistes à s’établir en Argentine. Selon Goñi, les Argentins ne se limitèrent pas à collaborer avec la filière de Draganovic, mais de leur propre initiative, ils en créèrent d’autres courants à travers la Scandinavie, la Suisse et la Belgique.

Selon Goñi, l’Argentine se compromit une première fois dans le recel de nazis en janvier 1946 lorsque l’évêque argentin Antonio Caggiano, évêque de Rosario et chef du chapitre argentin de l’Action Catholique prit l’avion avec l’évêque Agustin Barrère à destination de Rome où Caggiano devait être nommé cardinal. Alors qu’il séjournait à Rome, l’évêque argentin rencontra le Cardinal français Eugène Tisserant, à qui il transmit un message (enregistré dans les archives diplomatiques argentines) selon lequel « le gouvernement de la République d’Argentine souhaitait accueillir des Français dont l’attitude politique au cours de la dernière guerre pourrait les exposer, au cas où ils retourneraient en France, à de dures représailles et à des actes de vengeance privée ».

Au printemps de 1946, un certain nombre de criminels de guerre français, de fascistes et d’officiels du gouvernement de Vichy s’expatrièrent d’Italie vers l’Argentine selon une même filière : le bureau romain du CRI leur fournissait des passeports; ces derniers étaient alors revêtus de visas touristiques argentins (le besoin de présenter des certificats de santé et des tickets de retour avait été abandonné grâce aux recommandations de Caggiano). Le premier cas documenté d'un Français arrivant à Buenos Aires pour fuir l'épuration à la Libération en France est celui d'Émile Dewoitine, accusé d'intelligence avec l'ennemi et d'« atteinte à la sécurité extérieure de l'État ». Il voyagea en première classe sur le navire même qui ramenait le Cardinal Caggiano en Argentine

Peu après, selon Goñi, le recel de nazis par l’Argentine devint institutionnalisé lorsque le nouveau gouvernement de Peron désigna l’anthropologue antisémite Santiago Peraltacomme Commissaire à l’immigration et le supposé ancien agent de Ribbentrop Ludwig Freude (de) comme son chef du renseignement. Goñi fait valoir que les deux hommes mirent alors en place un service de secours composé d’agents du service secret et de conseillers de l’immigration, dont beaucoup étaient eux-mêmes des criminels de guerre européens, disposant d’une citoyenneté argentine et d’un emploi dans le pays

Parmi ceux qui ont bénéficié de ce réseau, on compte :

Erich Priebke (arrivé en 1947)

L’existence des filières italiennes et argentines n’a été confirmée que relativement récemment, essentiellement suite à des recherches effectuées dans des archives déclassifiées. Jusqu’aux travaux de Aarons et Loftus, et ceux d’Uki Goñi (2002), il était généralement admis que les ex-nazis eux-mêmes, organisés en réseaux secrets, avaient exploité seuls les filières d’évasion. La plus connue de ces filières est ODESSA (organisation d’anciens membres de la SS), fondée en 1946 selon Simon Wiesenthal, qui comprenait le SS-Obersturmbannführer Otto Skorzeny et le Sturmbannführer Alfred Naujocks et en Argentine, dit-on, Rodolfo Freude. Alois Brunner, ancien commandant du camp d’internement de Drancy près de Paris, se serait échappé vers Rome et ensuite vers la Syrie grâce à ODESSA (on pense que Brunner est l’ex-nazi le plus élevé en grade à être encore en vie en 2007) dont le contact en pays arabe n'était autre Johann von Leers, alias Omar Amin, l'adjoint de Joseph Goebbels28.

Des personnes prétendant représenter ODESSA revendiquèrent dans une note l’attentat à la voiture piégée commis le 9 juillet 1979 en France contre les chasseurs de nazis Sergeet Beate Klarsfeld. Selon Paul Manning (1980), « en définitive, plus de 10 000 anciens soldats allemands gagnèrent l’Amérique du Sud en utilisant les filières mises en place par ODESSA et le Deutsche Hilfsverein… »29

Simon Wiesenthal, qui conseilla Frederick Forsyth pour le roman et le scénario de The Odessa File, qui porta le nom à l’attention du public, donne également les noms d’autres filières d’exfiltration nazies comme Spinne (araignée) et Sechsgestim (Constellation des Six). Wiesenthal décrit ces dernières directement après la guerre comme des cellules nazies basées en Autriche où beaucoup de nazis s’étaient retirés et avaient gagné la clandestinité. Wiesenthal prétendait que le réseau ODESSA guidait les fuyards jusqu’aux filières catholiques à Rome (bien qu’il ne mentionne que Hudal et pas Draganovic) ou par une autre route passant par la France à destination de l’Espagne franquiste.

Odessa aurait été supportée par le réseau Gehlen Org, qui employait de nombreux anciens membres du parti nazi et était dirigé par Reinhard Gehlen, un ancien officier du renseignement militaire allemand, même si Gehlen, à l'instar de Canaris, était personnellement anti-nazi) employé après la guerre par la CIA. Le réseau Gehlen Org devint le noyau de l’agence de renseignements allemande BND, dirigée par Reinhard Gehlen depuis sa création en 1956 jusqu’en 1968. Outre le réseau Gehlen Org, le CIA organisa en parallèle et juxtaposa les réseaux Stay-behind en Allemagne. Des documents de la CIA divulgués en 2006 suite au 1998 Nazi War Crimes Disclosure Act démontrent que la CIA a organisé des réseaux Stay-behind d’agents allemands entre 1949 et 1955.

En 1952, l’ancien officier SS Hans Otto révéla à la police criminelle de Francfort l’existence de l’armée fasciste allemande Stay-behind BDJ-TD. Les extrémistes de droite arrêtés furent déclarés non coupables dans des circonstances mystérieuses.

Un des réseaux Stay-behind avait comme membres le Sergent Heinrich Hoffman et le Lieutenant Colonel Hans Rues et un autre, dont le nom de code était Kibitz-15, était dirigé par le lieutenant-colonel Walter Kopp, un ancien officier de la Wehrmacht, décrit par ses agents traitants américains comme un « nazi non repenti ». En avril 1953, dans un mémo divulgué en 2006, le quartier général de la CIA écrivait : « la colère qui surgit actuellement en Allemagne de l'Ouest en raison de la résurgence de groupes nazis ou néo-nazis est un bon exemple – à échelle réduite – de ce à quoi nous serions confrontés ». Par conséquent, certains de ces réseaux furent démantelés. Ces documents établissaient que les ex-nazis étaient un échec complet en termes de renseignements. Selon Timothy Naftali, un historien de l’Université de Virginie qui a examiné les documents divulgués à cette époque, « les dossiers montrent à longueur de page que ces gens posaient plus de problèmes qu’ils n’en résolvaient. Les nazis non repentis agissaient pour leur propre compte et utilisaient le manque d’informations dont souffrait l’Ouest sur l’Union soviétique pour l’exploiter à leur propre profit » Le service des archives américaines du NARA lui-même déclara en 2002 dans un communiqué concernant le recrutement par Reinhard Gehlen d’anciens nazis que, « en dehors des problèmes moralement gênants que cela impliquait, ces recrutements ouvrirent le gouvernement de l’Allemagne de l'Ouest et, par extension, les États-Unis, à une pénétration par les services de renseignements soviétiques »

Hans Globke, qui avait travaillé pour Adolf Eichmann au département des Affaires juives et participé à la rédaction des Lois de Nuremberg, devint le conseiller à la sécurité nationale du Chancelier Konrad Adenauer dans les années 1960 et « était le lien principal avec la CIA et l’OTAN » selon le Guardian. Un mémo envoyé en mars 1958 par le BND allemand à la CIA précisait que Adolf Eichmann « semble avoir vécu en Argentine sous le nom de Clemens depuis 1952 ». La CIA ne transmit toutefois pas cette information au Mossadisraélien, car elle craignait des révélations relatives à l’utilisation qu’elle avait faite d’anciens nazis à des fins de renseignement – Eichmann, qui était chargé du département des affaires juives fut enlevé par le Mossad deux ans après. Parmi les informations qui auraient pu être révélées par Eichmann se trouvaient celles concernant Hans Globke, agent de liaison de la CIA en Allemagne. À la demande de Bonn, la CIA persuada Life magazine de détruire toute référence à Globke des mémoires d’Eichmann, que le périodique venait d’acheter à sa famille

Les accusations contre le Vatican

On admet que des prêtres et prélats catholiques, notamment Hudal et Draganovic, ont été activement impliqués dans l’exfiltration de criminels de guerre recherchés en utilisant le réseau des couvents et des séminaires. Ce qui fait l’objet de débats est la question de savoir dans quelle mesure leurs actions ont été sanctionnées par leurs supérieurs hiérarchiques au sein de l’Église catholique.

Dans le cadre de sa fonction de visiteur apostolique aux Croates emprisonnés, Draganovic dépendait hiérarchiquement de l’évêque Giovanni Battista Montini, à l’époque secrétaire chargé des affaires extraordinaires au Secrétariat d’État du Vatican et qui allait plus tard accéder à la papauté sous le nom de Paul VI. Certains témoignages laissant entendre que Montini aurait été au courant des actions de Draganovic et les aurait approuvées ont récemment émergé dans un tribunal de San Francisco ou un recours groupé de survivants de l’Holocauste contre la Banque du Vatican est toujours en cours (mai 2007). Un des témoins dans cette affaire est William Gowen, un ancien agent de renseignements de l’armée américaine basé à Rome au cours des années qui suivirent la guerre et chargé d’enquêter sur la filière Draganovic. Son témoignage n’a pas été publié officiellement, mais une copie en a été obtenue par le journal israélien Haaretz qui a publié en janvier 2006 un article accusant Montini sur la base des preuves de Gowen. Selon l’article du Haaretz :

Mais d'autres enquêteurs et historiens sont d'un avis inverse. Ainsi la CEANA, commission d'enquête historique sur les activités du nazisme en Argentine conclut au contraire que les dignitaires du Vatican n'ont jamais encouragé ces exfiltrations. Elle a d'ailleurs produit une lettre de Montini se montrant scandalisé par la suggestion de l'évêque Hudal d'accorder refuge aux SS ou anciens de la Wehrmacht. Selon ces travaux, l'Église catholique aurait simplement été, comme la Croix-Rouge, tellement submergée par les flux massifs de réfugiés qu'elle n'aurait pu procéder qu'à des enquêtes sommaires, aisément contournées par les anciens dignitaires nazis. De nombreux espions soviétiques auraient d'ailleurs profité de la même « filière », toujours à l'insu des organisations de secours

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